La Princesse malpolie Songtext
von Henri Dès

La princesse malpolie faisait le malheur de son père, le roi Cœur d′Artichaut
C'était un bon roi, vieux et sage, aimé de tout le monde, aimé de tout son peuple
Il adorait sa fille, qui lui causait bien du tracas
La princesse malpolie ne voulait jamais se peigner
Elle se lavait rarement, et elle portait des vêtements sales
La couronne posée sur sa tête était toujours de travers
Elle était farceuse et capricieuse
Elle parlait haut et fort
Et elle disait beaucoup de gros mots

"Corne gris boudin, qui a salé mon petit-déjeuner?"
Et elle recrachait son chocolat sur la table
Bien sûr, ce n′était pas vrai
Son chocolat était sucré, comme d'habitude
C'était juste une occasion d′être sale et malpolie
"Que le gredin de coupable se dénonce pour que je le roule dans le fumier des chevaux"
Comme personne ne se dénonçait, elle allait elle-même se rouler dans le fumier
Et toute contente et souriante, elle partait à cheval dans la forêt
Où elle restait jusqu′au soir


De temps à autre, on entendait ses cris et ses gros mots
"Cape alligator, si je t'attrape, je te mords
Gribouillette scrafougneuse à roulettes"
Et d′autres choses moins jolies encore

Le roi Cœur d'Artichaut se lamentait dans le donjon
"Aucun prince ne vient jamais demander ma fille en mariage
Elle n′aura pas d'enfant, et le royaume n′aura plus de roi
Pauvre de moi, que vais-je devenir?"


Un beau jour d'été, la princesse malpolie se perd dans la forêt en courant après un lapin
Elle arrive aux bords d'un joli lac à l′eau pure et transparente
"Bah, comme c′est laid
Par la barbe de mon vieux père
Cette eau est si claire qu'on pourrait s′y baigner et en sortir propre
Bah, ta-ta-ta-ta-ta-ta, ra-ta-ta-ta-ta-ta, sauvons-nous d'ici"
À cet instant, elle entend un grand bruit dans son dos
"Teuf-teuf, cataproum, teuf-teuf, cataproum"
Elle se retourne, et elle voir arriver vers elle un gros nuage de fumée noire qui sent fort mauvais
"Voilà ce qu′il me faut, ça pue et ça tonitrue, c'est moche et ça salit
Corne gris boudin, ça, c′est un copain"
La princesse malpolie fait la fière, mais elle a quand même un peu peur
Peu à peu, elle distingue une grosse machine noire
Une sorte de cheval avec deux roues pour les pattes
Un guidon à la place des rênes, et un homme juché dessus
On ne peut voir sa tête qui est noire comme le reste

La princesse malpolie voudrait bien disparaître dans un trou de souris tellement elle a peur
Elle se force à répéter
"Corne gris boudin, ça, c'est un copain, corne gris boudin, ça, c'est un copain"
Mais c′est une toute petite voix brisée qui sort de sa bouche
L′homme à la machine descend, et il hôte ses lunettes
Il gronde
"Qu'est-ce que tu fais là?
Tu ne sais pas que tu es sur les terres du Prince Noir?
Maintenant, tu dois passer trois épreuves
Mais je te préviens, personne n′a jamais réussi encore"
Le Prince Noir attrape la princesse par la taille
Et il la jette dans le lac avant qu'elle ait eu le temps de faire "ouf"
Il y a une coup de tonnerre, un éclair dans le ciel
Et une grosse vague, deux fois plus haute que les arbres, emporte la princesse au milieu du lac
Un tourbillon l′entraîne au fond de l'eau où elle tourne à une vitesse folle
Puis elle est rejetée sur la rive, aux pieds du prince

"Ah-ha, bravo, tu as gagné
Il fallait, après avoir été lavée par l′eau du lac
Être encore sale
Deux personnes seulement ont réussi avant toi
Mais il reste deux épreuves"

Le prince met ses mains en porte-voix et il appelle
"La cailla de mes bottes, pieds de serpents, gros dégoûtant, sors de ta grotte"
Aussitôt, un monstre sort de l'eau crachant des flammes
Il approche sa gueule de serpent de la petite princesse et il grogne
"Ah, caca boudin, on me réveille?"
La princesse réplique
"Caca boudin toi-même, retourne te coucher"
"Hé, skildiou, on me résiste?"
"Corne gris skildiou, c'est toi qui insiste"
"Crac en feu, tu n′as pas peur, petite fille?"
"Nom d′une scribouillette scrafougneuse à roulettes, je ne suis pas une 'petite fille′
Et toi tu n'es qu′un crap-alligator à peau d'œuf
Une patouille polie au sel
Un sac à dos sans bretelles"
"Ah ben, bon, d′accord, c'est pas la peine de s'énerver, bon, d′accord..."

Elle continue avec d′autres noms d'oiseaux encore moins aimables
Jusqu′à ce que le monstre retourne dormir
"Ah ha ha, bravo, bravo
Moi, le Prince Noir, je te le dis, tu as un beau répertoire de gros mots
Une seule personne avant toi a aussi gagné cette épreuve
Mais elle a perdu à la troisième
Monte sur ton cheval et suis-moi"

La princesse malpolie suit la moto du prince
Ils arrivent à un grand château construit tout de travers
Le donjon penche, les créneaux sont en ruines
Il manque des tuiles sur le toit
Et tout est noir comme l'intérieur d′une cheminée
Le Prince Noir fait entrer la princesse dans un salon sans air et sans lumière
Qui ressemble à un immense cachot

"Voilà le trône" dit le prince en montrant un tabouret
La princesse pense
"Hmm, c'est laid ici, voudrait pas y vivre"
Le Prince Noir place la princesse devant un miroir et il demande
"Miroir, gentil miroir, dis-moi qui est la plus sale du pays
Qui connaît le plus de gros mots?"
Et le miroir répond
"Elle est devant moi
Elle connaît plus de gros mots que le dragon du lac"
"Et qui est la plus belle du pays?"
Le miroir montre alors une jeune fille en robe blanche
Aux longs cheveux bien peignés
À la figure fraîche
Et qui ressemble beaucoup à la princesse malpolie
Si elle était propre, polie, et bien habillée

Alors, le prince met un genou à terre et il dit
"Tu es la seule qui ait gagné les trois épreuves
Je cours demander ta main à ton père"
Il enlève son habit noir
Et l′on voit apparaître un prince magnifique
Qui prend sa fiancée dans ses bras

Le roi Cœur d'Artichaut fit une grande fête à leur mariage
Ils vécurent heureux et ils n'eurent... qu′un seul enfant
Un garçon, qui vint au monde en disant
"Ouiiin, corne gris boudin, on me réveille, ouiiin"